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etienne : latrines et autres
etienne : latrines et autres
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18 janvier 2009

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affiche_poing_clair
bon !ça c est fait y a plus qu a faire suivre puis viendre...

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Commentaires
O
Le désert peut encore s'accroître ou quand un système d'attitudes et de comportements devient manifestement plus tapageur, plus violent, plus excluant.... J'avais écrit l'année passée un manuscrit qui s'intitule "la discipline de la haine" et qui sera prochainement édité. <br /> A l'époque durant mes nuits d'insomnies j'imaginais que la police pourrait venir me cueillir dans mon appartement et elle l'a fait un an plus tard... pas chez moi mais à Tarnac, avec de jeunes gens... Cette discipline pourrait à la rigueur s'entendre comme une conséquence du déploiement de la société spectaculaire intégrée telle que Debord l'a analysée. Elle pourrait tout aussi bien expliquer à quelle sorte de sous bassement l'idéologie spectaculaire et marchande doit son expansion, c'est à dire quelle part d'"inhumanisme" et de haine disciplinée elle excite, au point de toujours faire précéder l'instinct policier, l'instinct marchand, l'instinct de pouvoir, de domination, d'imposture, de secrets, de servitude volontaire, à toute autres attitudes et comportements qui viennent en considération d'une humanité plus sensible, plus disposée à l'entraide et au partage. Il me semble qu'à la montée de la contre-révolution nazie Wilhelm Reich en analysant la carapace caractérielle des sujets d'alors avait montré de quelle manière elle influait sur ce qui encore n'était pas entendu sous la formule du spectaculaire concentré et si je ne prétends pas à l’analyse érudite et psychanalytique de Reich dont je n’ai pas la compétence, d’une manière subjective, j’ai le sentiment que l’homme d’aujourd’hui a une autre sorte de carapace que je me suis plu, radicalement, à appeler « la discipline de la haine ». . Erich Fromm plus tard aura formulé, toujours sous l'angle psychanalytique et parfois avec autant de bonheur d'un point de vue plus général les évidences et les conséquences de la structure et de la place hiérarchique des sujets dans « un monde injuste ». <br /> <br /> Il n'est venu, à ma connaissance, aucune science psychanalytique assez largement diffusée pour m'être connue, qui ait pris en charge une analyse scrupuleuse du sujet sous le mode de fonctionnement du spectaculaire intégré et c'est sans doute que les écoles avaient déjà fort bien intégré l'intégration que rien n'est venu... et qu'en conséquence, ce qui arrive à beaucoup, qu'ils le supportent et s'en accommodent, qu'ils le fassent supporter, ou qu'ils en souffrent tant et plus s’inscrit dans une logique imparable où l’on ne saurait « réformer le plus détails sans défaire l’ensemble ». Les rapports sociaux sont ainsi souillés, de manière plus méprisante et plus tapageuse, dès au lendemain de grèves et de manifestations qui n'ont plus alors qu'un caractère récréatif. Voilà bien et mon idée et le sens de mon scepticisme. Voilà bien en quoi le désert peut s’accroître. <br /> <br /> <br /> <br /> Ce qui est arrivé samedi soir relève bien des conséquences de ce qui est exposé dans "les commentaires sur la société du spectacle". Que rien n'échappe à la main mise marchande et pas même une association d'organisateur de musique qui prétend au nom de "zone libre" alors que de libres il n’y a rien et de zones il n’y a qu’une salle subventionnée, ce n'est pas nécessairement nouveau. Ce qui est d'un enseignement précieux c'est que deux années de Sarkozysme c'est à dire une franche accélération du processus de la machine, en dépit d'une journée de grève très suivie (et par les protagonistes de l'association notamment), tout cela demeure sans influences sur des gens qui en eux n'ont pas mené la plus petite réforme ce qui par conséquent implique qu'il n'y aura rien à attendre de ces grévistes d'un jour qu'une journée, tout au plus, récréative....<br /> <br /> Il y a avait un concert avec des groupes locaux. Mes jeunes copains étaient dans la salle. Je manque d'argent ce mois-ci je m'étais abstenu de payer l'entrée et je restais donc dehors rejoint parfois par mes camarades. (L'entrée était tout de même à dix euros et quand je suis arrivé il ne restait plus que deux groupes à passer). Je m'étais acheté un cornet de frite et je les mangeais à l'entrée de la salle guettant les copains. Je n'ai pas pensé à cet instant le moins du monde assister au concert depuis l'entrée de sorte que je ne pensais pas « resquiller » car c'est de cela dont il s'est agi après. En réalité je rêvassais et je pensais à toutes choses qui m'éloignaient beaucoup de l'agitation et de l'hystérie très alcoolisée des spectateurs. Une femme la première est venue me voir. La trentaine passée, ivre complètement, un sourire assez nigaud aux lèvres. Elle était pathétiquement sans forces et ce sourire permanent affiché cachait mal un profond sentiment délétère et triste ; cette fatigue que l'alcool révèle et qui rend bête. Elle me fait entendre que le prix est à acquitter et je crois alors naïvement qu'elle m'invite aimablement à me joindre à tous. Je décline ce que je crois être une invitation. Mais je la vois s'affairer de l'un à l'autre de ses partenaires et je ne comprends pas immédiatement qu'elle parle de moi et qu'il s'agit dès lors d'une « grave » affaire... L'un d'eux vient à moi et me demande si "ça va". Tout à mes rêveries encore Je perçois mal qu'il s'agit peut-être d'une accusation. Elle est si peu franchement proférée et il ne s'est pas appliqué à mettre le ton qui pouvait me faire entendre que ça n'allait pas en tous les cas pour eux et pour cause comment l'aurai-je supposé la salle était pleine et les caisses sans doute aussi... En vient par conséquent une troisième. Elle manoeuvre de façon à ne pas dévoiler la face véritable de leur mise en scène, de la grande affaire qui est le petit affairisme minable d'une association dont les revendications sont probablement assez démarquées de l'affairisme sans que ses membres ne le soient... On voit aisément que ces revendications ne sont alors ni plus ni moins qu'un fond de commerce parce qu'on ne saurait trouver dans l'incohérence entre le discours et la motivation de ceux qui le font, une authenticité. On va voir d’ailleurs en quoi la suite me donne raison. Elle insiste et sans penser à mal simplement parce que je suis sans le sou et que je ne peux pas, par pudeur, le lui dire ainsi j’avance que le prix des places est trop cher et je rajoute "pour moi, ce soir" et je dis encore que je pensais à tout autre chose que le concert, que tout au plus sorti de mes rêveries je guettais des copains dans la salle... Elle me dit sans précautions oratoires, avec un regard qui s'est fait dur "si tu ne payes pas tu dégages de l'entrée" et un signe de main accompagne sa condamnation, ce signe de main que font les flics, les patrons, les propriétaires, "dégages". "Dégages pauvre con"... que chacun a encore en mémoire. <br /> <br /> Ce que je fis non sans lui dire que son attitude confirmait parfaitement des rapports sociaux qu’en France tout le monde s’accorde à juger pour ce qu’ils sont : désertiques et insensibles, corrompus de la valeur marchande. Peu après alors qu’au dehors je m'ouvrais de ma colère aux copains, un homme quadragénaire se met en tête de me faire la morale d’un discours empreint d’une philosophie au moins débile, en regard de l’événement, le destin, dit-il, qu'il faut aller cueillir tous les matins et il m'accuse d'y manquer… Je romps immédiatement le dialogue avec ce passable idiot. Je décide cependant de payer la place parce qu'il est alors question pour moi de m'imprégner de l'ambiance et de savoir à qui, dans cette salle de concert, j'ai à faire, ce qu'elle implique et ce qu'elle exclue. <br /> Alors que je m’acquitte sans un mot du prix de la place, une troisième femme, d’une manière très professorale, en posant son imposante poitrine et son large corps en opposition, ses yeux accusateurs, de me glisser un mot de morale capitaliste, chrétien et éducatif sur ...le prix de la place... Je n'ai pas répondu à cette assurance qu’affiche en toutes circonstances les idiots lorsque le prix d’une place, d’une entrée ou d’un objet tient lieu tout entier de haute valeur morale et de règle humaine incontournable. On ne saurait s’aventurer à la dialectique face à de telles certitudes, les gens d’idiots deviennent alors méchants. <br /> Je suis entré et ai simplement ouvert les yeux. <br /> Je comptais dans la salle une majorité de jeunes gens et quelques trentenaires et quadragénaires tous mis de telle sorte qu'ils rappelaient aux hippies. Pas un arabe à l'exception bien entendu de deux ou trois jeunes filles, mais un pas homme maghrébin, ce qui confirmait l’intuition que j’avais de cette soirée... J'ai compté un jeune homme de couleur noire qui est resté seul tout le temps, aucune femme en approche et aucun camarade pour lui parler. <br /> Je passe sur les propos que j'ai entendu ça et là et sur la manière dont les prix se négociaient souvent au bar.... Celle qui avait été la plus méchante ne culpabilisait pas le moins du monde, elle allait de bras en bras, hilare. Elle ne se souvenait pas si elle y avait seulement jamais pensé qu'elle venait de faire basculer un homme qui rêvassait dans la réalité marchande de la France du XXIème siècle et qu'elle était quoique elle s'en défende un maillon de cette chaîne de la tyrannie marchande.<br /> <br /> Si j'avais été le maire de la ville d'Agen ou quelque autre personnalité pourtant ouvertement engagée au fonctionnement de cette tyrannie ou si j’avais eu à ses yeux une puissance érotique elle ne m'aurait pas parlé comme elle l’a fait, ni elle, ni ses complices. <br /> .... « Zone libre » est une imposture de petite envergure locale qui multipliée partout favorise le règne du despotisme marchand. <br /> <br /> « simplement que la domination spectaculaire ait pu élever une génération pliée à ses lois. Les conditions extraordinairement neuves dans lesquelles cette génération, dans l’ensemble, a effectivement vécu, constituent un résumé exact et suffisant de tout ce que désormais le spectacle empêche ; et aussi tout ce qu’il permet. » (Commentaires sur la société du spectacle, 1988, Guy Debord).<br /> Ce qui est empêché en l’occurrence c’est de rêvasser si l’on ne s’acquitte pas d’un prix, ce qui est permis c’est dire au rêveur « tu dégages », rien moins. Ce qui est empêché c’est la présence de maghrébins, ce qui est permis c’est de tenir un concert qui exclue.
etienne : latrines et autres
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